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French Tech : un panorama flatteur pour nos start-up

Le gouvernement français, à travers le ministère de l'économie, vient de dévoiler un « panorama » de la French Tech. Une première qui devrait nous donner des informations intéressantes en tant que consommateurs, puisque ces jeunes entreprises visent pour certaines à révolutionner nos modes de consommation (pour le meilleur comme pour le pire).

Alors faisons un résumé de ce panorama pour mieux comprendre ce qu'est la French Tech, pourquoi le gouvernement souhaite tant mettre en avant ces entreprises alors qu'elles ne font pas toujours les gros titres pour de bonnes raisons. C'est un sujet complexe, alors essayons d'en appréhender le fonctionnement, les enjeux et son importance dans notre quotidien (de consommateurs).

Déroulé de l'article :

 

French Tech : des chiffres très flatteurs, pour quelle utilité ?

Quand on évoque la French Tech, on pense tout de suite à quelques solutions à destination des consommateurs qui ont dors et déjà réussies à s'imposer : BlaBlacar pour le covoiturage, Mano Mano (vente en ligne), Doctolib pour les rendez-vous médicaux, etc... À ce stade on parle d'ailleurs de licorne ou de scale-up, dont le chiffre d'affaire est supérieur à 1 million d'euros.

Mais sous cette bannière French Tech au nom anglophone, se cachent selon les chiffres du ministère de l'économie quelques 18.000 entreprises. Certaines comme celles que nous venons de citer s'adressent au grand public, mais beaucoup sont orientées vers le B2B (business to business).

Chose étonnante, pour avoir le droit de consulter le panorama complet il faut d'abord s'identifier. Mais ce n'est pas le plus étrange dans cette histoire, car le gouvernement français est censé faire preuve de neutralité quand il évoque des entreprises privées, hors la présentation du panorama sur le site du ministère de l'économie est clairement « à la gloire de la French Tech ».

Les chiffres sont éloquents : 18.000 entreprises qui emploient 450.000 personnes et ont levé près de 6 milliards d'euros depuis le début de l'année 2025. Mais quelles sont ces entreprises qui se cachent derrière, quel est leur secteur d'activité et leur intérêt pour nous, les consommateurs ?

La French Tech couvre plusieurs secteurs :

  • les Assurtech (assurances)

  • les Biotech (contraction de biologie et technologie)

  • les Cleantech (technologies propres)

  • les Deeptech (technologies de rupture)

  • les Greentech (transition écologique)

  • les Fintech (contraction de finance et technologie)

  • les Medtech (technologies médicales)

  • les Spacetech (technologies spatiales)

  • n'oublions pas l'IA (intelligence artificielle)

Il en existe sans doute d'autres et ne sommes des grands connaisseurs de ces écosystèmes et leur répartition n'est pas égale, la grande spécialité de la French Tech reste les solutions logicielles et notamment les SaaS (Software as a Service), avec 31% des start-up en activité. À lui seul, le marketing réuni 9% des start-up de la French Tech, soit plus de 1.600 entreprises !

Ces logiciels servent à faciliter la comptabilité, la gestion, la logistique, le RSE, etc... Mais aussi et surtout comme nous l'avions vu dans notre article sur le CES Las Vegas 2023, dans lequel nous avions expliqué les dernières innovations de nos start-up : aider les entreprises à vous soutirer un maximum d'argent avec des techniques marketing et d'incitation à l'achat, de suivi et de fidélisation de la clientèle, de manipulations mentales, etc.. C'est tout bonnement diabolique !

Il y a donc 50 nuances de French Tech, certaines sont utiles et révolutionnent nos habitudes de consommation, même si elles ont un coût (y compris quand leur utilisation est gratuite). Certaines servent un objectif de souveraineté, dans le domaine médical ou de la défense, ce qui nous semble indispensable, mais comment le gouvernement choisi t'il celles qu'il soutient ?

Les milliards pleuvent sur la French Tech, sont ils bien dépensés ? © pixabay

Les milliards pleuvent sur la French Tech, sont ils bien dépensés ? © pixabay

French Tech : comment sont choisies les start-up accompagnées ?

Comme nous l'avions déjà dénoncé l'an dernier, le programme French Tech 120 (et Next 40) qui est censé recenser les fleurons de la Start-up Nation française ne s'intéresse qu'à la capacité des entreprises à lever des fonds et augmenter leur chiffre d'affaire, sans jamais prendre en compte la satisfaction des utilisateurs ou l'utilité réelle des solutions proposées.

Nous avons pourtant vu où mène le plus souvent ces seules préoccupations avec les géants américains comme Airbnb ou Uber, entre prédation et justement « ubérisation » des emplois. Le panorama de la French Tech qui nous est servi ne manque d'ailleurs pas de souligner, comme une victoire, un renforcement des liens entre start-up françaises et groupes du CAC 40.

Les entreprises de la French Tech bénéficient de tout un écosystème qui est en partie financé par nos impôts et a pour but de les aider à s'installer (incubateurs), à se financer et se développer, à bénéficier d'exonérations de charges, etc.. Et donc d'en assurer la promotion à travers les outils gouvernementaux.

En effet, il y a plus de 10 programmes d'aides : Je choisis la French Tech, French Tech 2030, French Tech Tremplin, French Tech Next40/120, French Tech Rise, French Tech Central, Bourse French Tech, Axe French Tech, French Tech Emergence, crédit impôt recherche, crédit impôt innovation, etc...

Soit en additionnant les aides, jusqu'à plus de 200.000€ de subventions pour chaque start-up accompagnées d'une exonération de charges sociales et fiscales d'au moins 20%, et encore une ribambelle d'aides régionales (pouvant même atteindre 500.000€ dans certaines régions).

Certes, certaines start-up apportent un vrai plus à notre quotidien ou répondent à des enjeux majeurs et il est parfaitement normal de les accompagner, mais la plupart ont des objectifs qui ne servent pas l'intérêt général. Nous ne voyons d'ailleurs jamais le moindre intérêt de la French Tech pour les utilisateurs et les consommateurs, ce qui est tout de même assez regrettable.

Tout n'y est qu'une histoire de gros sous, de levées de fonds, de croissance et de chiffre d'affaire. Pour reprendre nos exemples de début d'article, notre gouvernement soutient donc avec de l'argent public BlaBlaCar qui est noté 1,3/5 pour plus de 5.000 avis clients sur Trustpilot ou Doctolib qui bénéficie d'une note de 3,6/5 pour plus de 3.000 avis clients.

Ce que nous regrettons avec ces entreprises, du moins celles qui s'adressent aux consommateurs français, c'est que leur modèle économique est bien souvent uniquement basé sur le marketing : faire un maximum de communication pour attirer le chaland, et peu importe si il est déçu ensuite du moment que l'on arrive à en attirer toujours plus.

Hors il n'y a pas de recette miracle, les millions voir milliards d'euros que vous claquez en marketing, c'est autant d'argent que vous ne mettez pas dans la qualité des produits ou services que vous vendez, ni dans le service après vente. C'est juste de la pure logique, ou de "l'économie pour les nuls" qu'il est toujours bon de rappeler.

Que penser de toutes ces start-up, elles sont nombreuses, à proposer des assurances, des solutions de paiement ou bancaires, etc... Autant de secteurs peu recommandables de base, il est peu probable que les nouveaux venus aient de meilleures intentions. Mais ne leur faisons pas un procès d'intention justement, car nous ne les utilisons pas.

Le business plan de la French Tech (dessin humoristique) © pixabay

Le business plan de la French Tech (dessin humoristique) © pixabay

SAS ou ESS : un deux poids deux mesures étonnant

Au final donc, de notre point de vue de consommateurs, sur les 120 entreprises accompagnées par le gouvernement français, il n'y en a pas plus de 4 ou 5 que nous vous recommanderions. Car dans leur grande majorité (en tous cas pour celles à destination des consommateurs), ce ne sont pas des entreprises qui nous veulent du bien et nous vous conseillerions donc plutôt de tout faire pour les éviter.

Le but est bien souvent de lever un maximum de fonds auprès d'actionnaires (et en subventions), de développer vitesse grand V l'activité en faisant du marketing à outrance pour devenir rentable et - in fine - de reverser des dividendes aux actionnaires.

Sauf que dans cette histoire, leurs bénéfices ne tombent pas du ciel, mais sortent de nos porte-monnaies et mieux vaut donc se méfier des beaux discours qui servent une économie capitaliste et libérale qui a montré ses limites. Sous des chiffres d'apparence flatteurs, ces aides à tout va sont elles vraiment justifiées ?

Alors pour comparer prenons un autre écosystème, au hasard celui de l'économie sociale et solidaire (ESS) : des entreprises qui souhaitent concilier l'activité économique et l'utilité sociale, qui ont un statut reconnu par l'état et dont le fonctionnement est strictement encadré (bon ok, ce n'est pas le fruit du hasard).

En effet, une entreprise de l'ESS a de nombreuses obligations : porter un projet utile, une gestion démocratique, l'encadrement des bénéfices avec obligation de les réinvestir, le profit individuel est proscrit et les rémunérations sont encadrées pour éviter un trop grand écart de salaire entre direction et employés, etc...

L'écosystème de l'ESS représente 329 milliards d'euros de chiffre d'affaire (soit environ 11% du PIB), 150.000 entreprises et 2.600.000 emplois (soit 13,7% des emplois du secteur privé) selon les chiffres de la Cour des Comptes. Car si les chiffres de nos start-up sont soigneusement compilés pour faire valoir la Start-up Nation chère à notre président, l'ESS elle n'a jamais fait l'objet de chiffrages précis de la part du gouvernement jusqu'à ce jour.

Les entreprises de l'ESS adoptent des modes de gestion démocratiques et participatifs. Elles encadrent strictement l'utilisation des bénéfices qu'elles réalisent : le profit individuel est proscrit et les résultats sont réinvestis.

Source : Ministère de l'économie

L'écosystème de l'ESS est donc bien plus important que celui de la French Tech : 10 fois plus d'entreprises, 30 fois plus de chiffre d'affaire et 6 fois plus d'emplois créés. Le gouvernement français a pourtant décidé de réduire de moitié le budget consacré à l'économie sociale et solidaire en 2026 (12,3 millions d'euros au lieu de 26,7 millions en 2025), alors qu'il multiplie les initiatives et les aides financières pour soutenir la French Tech.

Autant dire qu'il y a un deux poids deux mesures qui pose question, soutenir l'innovation est une nécessité dans certains secteurs nous ne dirons pas le contraire, mais pourquoi le faire sans distinction sur des critères uniquement mercantiles quitte à aider des entreprises qui ne servent pas l'intérêt général ?

L'exemple de BlaBlaCar est d'ailleurs assez révélateur, raison pour laquelle nous le prenons souvent. Car la start-up est nominée depuis plusieurs années au programme Next40 et bénéficie d'un accompagnement de l'état pour se développer, une entreprise qui n'a rien de solidaire et prélève des frais sur chaque place de covoiturage.

Il existe pourtant une société coopérative d'intérêt collectif (SCIC) qui propose la même chose : Mobicoop qui est sans frais pour les utilisateurs, mais ne bénéficie pas du même soutien de l'état français. Elle fait d'ailleurs partie du collectif les Licoornes que nous vous avons présenté récemment et propose une alternative économique au modèle dominant.

Pourquoi choisir d'aider les licornes et SAS qui ont un modèle économique basé sur le marketing et l'actionnariat, alors que de l'autre on choisi de ne pas le faire de la même manière pour les entreprises de l'ESS qui portent une économie locale et sociale bien plus utile et créent 6 fois plus d'emplois ?

Pourtant la création d'emplois est un des arguments préférés de nos dirigeants politiques quand il s'agit de justifier leurs décisions controversées, alors la question du financement des entreprises et de son efficacité se pose d'autant plus !

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J
Merci pour cet article très détaillé et instructif ! C’est intéressant de voir à quel point la French Tech est vaste et diversifiée, mais aussi de comprendre les différences avec l’économie sociale et solidaire. Les chiffres et exemples que vous citez permettent de mieux saisir les enjeux pour les consommateurs et les choix politiques qui accompagnent ces start-up. Cela donne matière à réflexion sur l’impact réel de ces entreprises dans notre quotidien et sur l’importance de soutenir des projets à la fois innovants et socialement utiles.
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