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La cheapflation, technique industrielle qui consiste à modifier les recettes pour optimiser ses bénéfices, a fait les gros titres l'an dernier avec des cas emblématiques d'abus apparus en pleine période d'inflation alimentaire.
Revenons sur ce phénomène qui pose de nombreux problèmes au niveau de l'information des consommateurs, mais aussi de santé et d'environnement car tout est lié. Nous verrons ensuite si la pratique est largement répandue ou reste limitée à ces quelques cas, puisque la DGCCRF a enquêté sur cette pratique problématique.
Déroulé de l'article :
La cheapflation est une technique utilisée par les multinationales de l'industrie agroalimentaire pour augmenter ses bénéfices en douce, le terme étant la contraction de « cheap » qui veut dire bon marché (pas cher) et de « inflation ». Elle n'est pas nouvelle mais est mieux documentée depuis 2023, la pratique ayant connu une recrudescence durant la forte période d'inflation au début des années 2020.
Son principe est simple à comprendre, elle consiste à modifier la recette pour remplacer une partie des matières premières les plus coûteuses par d'autres qui le sont moins. Le produit fini revient un peu moins cher à produire, mais est vendu au même prix aux consommateurs (voir même parfois plus cher).
À la base ce sont des remplacements simples, on remplace le beurre français par de l'huile de palme importée de l'autre bout du monde, qui revient moins cher même avec le coût du transport. Et puis tant pis si son bilan carbone est désastreux, si on participe à la déforestation et que l'on saborde l'élevage français.
Néanmoins si elle attire plus l'attention depuis quelques années, c'est qu'une fois que les industriels on réussi à remplacer toutes les matières premières brutes, ils ne se sont pas arrêtés là et courent toujours après l'augmentation de leurs profits pour satisfaire leurs actionnaires.
Ils ont alors commencé à réduire dans les plats cuisinés les proportions d'aliments onéreux aussi, comme nous l'évoquions déjà dans un article sur la cheapflation écrit l'an dernier.
Comme révélé par FoddWatch, c'est par exemple Findus qui réduit la quantité de poisson de 5% dans ses barquettes de poisson à la bordelaise. Ou bien Le Gaulois qui réduit la quantité de dinde et de fromage dans ses cordons bleu pour les remplacer par de la chapelure, etc...
Bien entendu le premier reproche que l'on puisse faire à la cheapflation, c'est que la plupart du temps ces modifications rendent les recettes moins saines et donc moins bonnes pour la santé des consommateurs.
Elle s'accompagne en plus trop souvent d'une augmentation du prix de vente, alors qu'au contraire le prix de revient ayant baissé on pourrait s'attendre à ce que le prix de vente à minima n'augmente pas. Nous avons même vu des cas de cheapflation qui étaient accompagnés de shrinkflation, autre technique qui consiste à réduire la quantité de produit sans en baisser le prix (la plaquette de beurre de 250 grammes qui passe à 225 grammes).
Mais le pire au final, c'est qu'en plus les industriels n'hésitent pas à mentir pour tromper les consommateurs en indiquant sur les emballages des phrases de type « nouvelle recette, encore plus généreuse et savoureuse » alors qu'il n'en est rien.
Ce n'est bon ni d'un point de vue gustatif, ni d'un point de vue nutritionnel, ni d'un point de vue environnemental. Le seul intérêt de la cheapflation vous l'aurez compris, c'est d'augmenter les bénéfices réalisés pour reverser plus de dividendes aux actionnaires, toujours plus gourmands.
Le discours officiel évoque des problèmes d'approvisionnement, l'augmentation du prix des matières premières (ce qui est vrai dans certains cas) ou d'éviter une augmentation plus importante des prix de vente. Mais comme expliqué dans cet article fin 2023 les chiffres sont sans appel, les multinationales de l'agroalimentaire ont profité des crises pour augmenter leurs marges !
Comme nous venons de l'expliquer, la cheapflation ne présente aucun avantage pour les consommateurs, son seul et unique but est d'augmenter les bénéfices. Il est regrettable qu'en plus les marques fassent preuve d'une attitude cynique, tentant de faire passer ces modifications de recettes comme des améliorations.
Mais est-ce que la technique est devenu courante ? Outre quelques exemples documentés par les associations de consommateurs, combien de produits sont concernés ?
Une enquête de la DGCCRF menée en 2023 est rassurante, mais elle ne s'est intéressée qu'aux cas pour lesquels la modification de recette n'a pas été indiquée sur le packaging du produit. Autrement dit, ceux dont la recette a été modifiée mais pas les arguments de vente sur le paquet ou la liste des ingrédients.
La direction générale de la concurrence a durant l'année 2023 réalisé des contrôles sur 651 produits contenant des viandes ou poissons dans leurs recettes (lasagnes, hachis parmentier, rillettes de poissons, pâtés et terrines, etc...).
La DGCCRF indique que 5% des produits contrôlés étaient en infraction, ce qui fait environ 33 produits sur les 651 qui relevaient bien de la cheapflation. Enfin du moins, qui ne respectaient pas leurs obligations d'affichage pour informer sur les changements effectués.
Car les industriels ont le droit de modifier leur recette si ils changent les informations sur le paquet du produit en conséquence, il est impossible de savoir combien ont subi une cheapflation dans les règles. Si l'on refait cette enquête sur trois ans plutôt qu'une seule, à combien arriverait on ?
Mais leur enquête nous apprend malgré tout que 25% des produits contrôlés présentaient d'autres anomalies, notamment des manquements sur des espèces animales non indiquées sur l'emballage alors qu'il y en a dans le produit, voir même la présence d'un ingrédient non autorisé.
Les enquêteurs ont également trouvé de nombreuses allégations trompeuses sur la qualité des produits, donnant l'exemple d'un produit contenant des nitrates (conservateur classé cancérogène) alors que sur l'emballage il est clairement indiqué qu'il est « sans conservateurs ».
Néanmoins nous n'en saurons pas plus car comme encore trop souvent les résultats rendus publics n'indiquent pas les entreprises ni les marques concernées par ces anomalies ou infractions.
Il y a tout de même un exemple qui a donné lieu à un procès verbal dans le cas de la cheapflation : des feuilletés au comté dont la proportion du fromage mis en avant avait été réduite de 2%, mais dont la liste d'ingrédients n'avait pas été modifiée.
De petits changements de recettes qui n'ont pas l'air de grand chose, mais qui tendent la qualité de l'alimentation vers le bas juste pour optimiser les bénéfices d'entreprises cupides au détriment des consommateurs, c'est un des aspects auxquels mieux faut faire attention !
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